La Débutante de Sonoko est un patchwork savoureux. Dessous son kimono fleuri,
se mêlent Shakespeare, Polnareff, Brigitte Bardot, David Lynch, Nijinsky et
tant d'autres. Cet album est comme une douce sucrerie japonaise que l'on ouvre
délicatement, une sorte de Madeleine de Proust en forme de kashiwa-moshi (un
gâteau japonais à base de pâte de riz).
Il y a dans cette œuvre
atypique comme un parfum d'enfance retrouvée.
Le voyage est plein de
promesses. Des images défilent dans la tête comme sur un écran de cinéma, des
scènes de films divers : Le Château
de l’Araignée de Akira Kurosawa ; Les
Contes de la lune vague après la pluie de Kenji Mizoguchi ; La Ballade de Narayama de Shôhei Imamura ;
Dolls et Hana-Bi de Takeshi Kitano ; Princesse
Mononoké et Le Voyage de Chihiro de
Miyazaki ; ou encore Eraserhead de
David Lynch, etc.
Comme une flottaison
de nuages, s'élèvent dans l'esprit des réminiscences de lecture : Pays de neige de Yasunari Kawabata ; Eloge de l'ombre, Le Meurtre d'O-Tsuya ou encore Histoire
secrète du sire de Musashi de Junichirô Tanizaki.
La Débutante, quoiqu'on en dise, sait se montrer très experte pour réveiller l’esprit
d’enfance qui sommeille en nous. Cet album est une sucrerie aigre-douce :
derrière la douceur, on sent perler toute une mélancolie qui serre le cœur.
Comment malgré tout ne
pas être aux anges avec Sonoko ? Je l'imagine parée en geisha dans un jardin
aux senteurs florales ; en ombre "japonaise" derrière un shôji, ces
fameuses parois translucides qui filtrent subtilement la lumière ; ou bien
assise à l'ombre délicate d'un cerisier.
Sonoko est une sorte
de geisha moderne dont les instruments électroniques auraient remplacé le
fameux shamisen.
A l'écoute de ces
berceuses douce-amère, c'est une porte qui s'ouvre sur le "monde des
fleurs et des saules pleureurs".
Adieu l'hiver, voici le
printemps qui s'annonce plus tôt que prévu. Un entêtant parfum monte des fleurs
qui poussent comme de jeunes filles ; déjà pruniers et cerisiers s’habillent
de dentelle rose et blanche.
Thibault Marconnet
27/02/2014
Kitagawa Utamaro, Ase o fuku onna (Femme essuyant la sueur de son visage), 1798 |
«Le monde des fleurs et des saules.» Voila le genre de détails relevés qui me plaisent. J'aime ce billet. Merci.
RépondreSupprimerC' est là où je prends encore mon billet pour le bal des casse-pieds, je goûte le charme subtil des estampes mais cette culture japonaise me semble aussi cruelle que Sade dont il était question récemment sur ton blog, pour une fois je rejoins Amelie Nothomb, à part le fantasme occidental, la Japonaise me semble une victime non consentante du perfectionnisme outrancier.
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