Alfred Kubin, Black Mass, 1905 |
« J’exprimerai patiemment toutes les raisons de mon dégoût du genre humain. Quand je serai absolument seul, je chercherai une religion (…) et au moment de la mort, j’abjurerai cette dernière religion pour bien montrer mon dégoût de la sottise universelle. Vous voyez que je n’ai pas changé. »Charles Baudelaire
Je suis une fleur de mélancolie,
Et n’ai pour sève qu’un sombre lait ;
Poussant sur des orties,
Un soleil froid baise mes plaies.
Au soir tombé, je me transmue
En homme et mes pas me mènent
Jusqu’à une cathédrale de verdure.
Le dos courbé, les lèvres coulant de pus,
De ma bouche ne sort aucun Amen :
Car je suis un déchu, un parjure.
Des moines, les habits baignés de sang,
Sortent de la nef de lierre
Et boivent la liqueur qui jaillit
De leurs fouets brûlants.
À leur vue, je suis homme de pierre
Et crache sur la clef du Paradis.
Ils processionnent en chantant l’abîme,
Et vomissent de vineuses glaires,
Éclaboussant les arbres sur leur passage.
Ils aiguisent leurs dents avec des limes :
Leurs mâchoires grincent dans un bruit d’enfer
Et je ferme mes yeux par peur de ces images.
Je rampe telle une bête jusqu’à l’autel,
N’y trouvant que des os rongés et la faim
Me fait hurler comme un aveugle dans la nuit.
Les murs de ronces se moquent de mon appel
Et je gémis mon infortune, et je me plains.
Sur mon visage glisse une cendreuse pluie.
Un vieux ciboire repose sur la poussière ;
Mes doigts crochus le touchent avec crainte.
Un feu embrase mes veines que je croyais parti.
Je n’attends plus rien d’une vaine lumière :
Mes yeux luisent des lueurs de la folle absinthe
Et je m’alimente du reste des noires hosties.
© Thibault Marconnet
05/03/2011
Alfred Kubin, La Peste, 1903-1904 |
Alfred Kubin, The Swamp, 1905 |
Merveille que ces blasphèmes éructés comme les injures à une femme passionnément aimée, mais cela reste de l' amour.
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