jeudi 6 février 2014

L'épine errante

Jean Gounin, Le paradis des sans lueurs


À Jean Gounin, pour son Paradis des sans lueurs.



Où va ce squelette d’acier,
Cette forme insectoïde
Qui se courbe dans le brasier, 
Possédée par le sable aride ?

C’est en un désert souterrain
Qu’il s’étiole indéfiniment,
Abandonné du Roi souverain ;
Entends donc la prière du dément !

Les yeux brûlés par un soleil de rose,
Il marche, frêle et sans espoir.
Cendreux et aveuglé, il dépose
Son cœur de ronces : poisseuse poire.

Ses membres sont encordés dans une chartre
Et la plaie du jour lui ferme sa porte.
Insensibles pierres, écoutez-la se battre !
Cette âme d’où s’écoule une lumière morte.

Ses pieds pris dans des sables émouvants,
Il se calcifie, en attente de la nuit.
Son dos saigne sous le fouet du vent
Et son visage mendie l’absente pluie.

Il veut boire au cratère l’eau de vie,
Mais dans sa bouche grincent des sauterelles.
Tout n’est que mirage pour ce banni,
Pour sa douloureuse peau sans dentelle.

Nulle croisée des chemins
Pour l’être qui se lamente ;
Rose du ciel, accueille sur ton sein
Ce bourgeon mort, cette épine errante.


© Thibault Marconnet

05/02/2013

Je vous invite à faire plus ample connaissance avec l'oeuvre de cet ami peintre, Jean Gounin. Une oeuvre atypique en bien des points.
Voici l'adresse de son site : 

3 commentaires:

  1. Ce n' est pas une poésie facile.Elle aguiche le chaland parce qu' elle est belle et musicale mais ce n' est pas une fille facile que cette muse là. La souffrance, la folie, ces spectacles édifiants et inquiétants, miroirs de nos félures...J' adore évidemment.

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    1. Un jour il partira dans l'univers de cendres
      il aura pour destin la nuit sombre aux odeurs de mercure
      il aura pour destin le silence des ombres
      On le verra venir couvert de déchirures
      le manteau déchiré en peau de ses blessures
      Un jour tu le verra toi la belle écarlate
      toi qui souris comme l'amour
      un jour tu pleureras de n'avoir point vécu
      sauf en sournois labeurs sales et sans vertu

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    2. Cher Jean, ton poème me saisit...
      Merci pour cette offrande qui m'émeut.

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