dimanche 7 décembre 2014

Keaton Henson - Birthdays (Deluxe) [2013]




Voici un jeune homme Anglais né en 1988 et qui semble sorti tout droit d’une autre époque. Être fragile, dandy sensible, Keaton Henson est un roseau blanc battu par les vents. Depuis sa tour d’ivoire perdue dans les bois, il nous offre pour trésor le témoignage d’un cœur plus cassant que du verre. 

Avec sa barbe épaisse, son visage creusé comme une roche rongée par des pluies diluviennes et ses yeux caves, ce jeune poète échevelé aux allures de clochard céleste ou de personnage dostoïevskien ne sera jamais une étoile du rock. C’est un oiseau blessé qui cherche à retrouver son nid, un livre déchiré en quête de sa reliure divine. 

Ainsi que je l’ai lu quelque part, les concerts sont une épreuve presque insurmontable pour ce jeune homme à fleur de peau : sujet à des crises de panique fréquentes, ce n’est pas tant sur scène qu’il donne à voir son feu et ses larmes mais bien dans ses disques. Cet album a comme un goût de gâteau d’anniversaire qu’on passerait tout seul, isolé dans sa chambre, loin du bruit et des cotillons de la fête.

Keaton Henson est un être lucide et tourmenté. Les peines d’amour, les amitiés déçues, la mort sont autant de sujets qui affleurent en ronces rouges du sein de ses chansons. Solitaire, il fuit les foules comme un homme plongé dans des eaux en furie tenterait de se dérober à la noyade. Son chant ne ment pas. “Chanter est façon d’être nu”, ainsi que le chante Jean-Louis Murat, autre grand solitaire. Il y a dans la voix du jeune Keaton Henson une blessure qu’on aimerait panser, une plaie sur laquelle on souhaiterait pouvoir déposer un peu de baume fraternel. 

Voici des paroles, issues de Beekeeper : « You all say I’ve crossed a line / But the sad fact is I’ve lost my mind / Because I’m just gettin’ started, let me offend / The devils got nothing on me my friend / All I want is to be left alone / Tact from me is like blood from a stone… »

Le poète français, Pierre Reverdy, le disait déjà avec force : « S’agit-il de distraire ? Point du tout. Il s’agit d’émouvoir. Ce qui n’est rien de moins que faire jaillir la source du rocher. »

Puissiez-vous être sensible à cette source d’eau et de feu mêlés, à cette fleur de peau qui, sans jamais rien compter, nous fait don de ses pétales déchirés.


© Thibault Marconnet
le 17 mars 2014


Tracklist :

01 - Teach Me
03 - You
07 - Kronos
08 - Beekeeper




Keaton Henson

1 commentaire:

  1. Salut Chris,
    En effet, il ne chante pas sur son nouvel album, “Romantic Works” ce qui, je l'avoue, m'a quelque peu dérouté, étant donné que je suis très sensible au timbre fragile de sa voix.
    Afin que tu puisses découvrir ses deux précédents albums, “Dear” et “Birthdays”, je vais les envoyer sur ta Dropbox. Noël est en avance et ma hotte est bien garnie ! :-)
    Merci pour ton commentaire ! Bien à toi.

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