« 1. S’il pouvait penser, le cœur s’arrêterait. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 38)
« 6. J’ai demandé si peu à la vie – et ce peu, la vie me l’a
refusé. Un rayon d’un reste de soleil, la campagne, un peu de calme avec un peu
de pain, une conscience d’exister qui ne me soit pas trop douloureuse, et puis
ne rien demander aux autres, ne rien me voir demander non plus. Cela même m’a
été refusé, de même qu’on peut refuser une aumône non par manque de cœur, mais
pour éviter d’avoir à déboutonner son manteau. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 43)
« 6. J’écris, plein de tristesse, dans ma chambre paisible, seul
comme je l’ai toujours été, seul comme je le serai toujours. Et je me demande
si ma voix – en apparence bien peu de chose – n’incarne pas la substance de
milliers de voix, la faim de se dire de milliers de vies, la patience de
millions d’âmes soumises, comme la mienne dans son destin quotidien, à leur rêve
inutile, à l’espérance qui ne laisse pas de traces.
En de tels moments, mon cœur bat plus fort, conscient que je suis de
son existence. Je vis plus, car je vis plus grand. Je sens dans ma personne une
force religieuse, une sorte de prière, presque une clameur. Mais la réaction à
mon encontre descend du haut de mon intellect… Je me vois dans mon quatrième
étage de la rue des Douradores, spectateur de moi-même alourdi de
sommeil ; je regarde, sur ma feuille de papier à moitié remplie, mon
existence vaine et sans beauté, la cigarette à bon marché – tout ce que
j’expose longuement sur ce sous-main usé. Moi, du haut de mon quatrième étage,
interpellant la vie ! exprimant ce que ressent l’âme des autres ! et
faisant de la prose, comme les génies et les célébrités ! Moi, ici, ni
plus ni moins !... » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 43-44)
« 11. Nous ne nous accomplissons jamais.
Nous sommes deux abîmes face à face – un puits contemplant le
Ciel. » Fernando Pessoa (in Le livre
de l’intranquillité, p. 48)
« 40. Pour moi, lorsque je vois un mort, la mort m’apparaît
alors comme un départ. Le cadavre me fait l’impression d’un costume qu’on
abandonne.
Quelqu’un est parti, sans éprouver le besoin d’emporter son seul et
unique vêtement. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 70)
« 45. Vivre une vie cultivée et sans passion, au souffle capricieux des
idées, en lisant, en rêvant, en songeant à écrire, une vie suffisamment lente
pour être toujours au bord de l’ennui, suffisamment réfléchie pour n’y tomber
jamais. Vivre cette vie loin des émotions et des pensées, avec seulement l’idée
des émotions, et l’émotion des idées. Stagner au soleil en se teignant d’or,
comme un lac obscur bordé de fleurs. Avoir, dans l’ombre, cette noblesse de
l’individualisme qui consiste à ne rien réclamer, jamais, de la vie. Être, dans
le tournoiement des mondes, comme une poussière de fleurs, qu’un vent inconnu
soulève dans le jour finissant, et que la torpeur du crépuscule laisse retomber
au hasard, indistincte au milieu de formes plus vastes. Être cela de
connaissance sûre, sans gaieté ni tristesse, mais reconnaissant au soleil de
son éclat, et aux étoiles de leur éloignement. En dehors de cela, ne rien être,
ne rien avoir, ne rien vouloir… Musique de mendiant affamé, chanson d’aveugle,
objet par un voyageur inconnu, traces dans le désert de quelque chameau
avançant, sans charge et sans but… » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 75-76)
« 54. J’emporte avec moi la conscience de ma défaite, comme
l’étendard d’une victoire. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 85)
« 58. Le milieu ambiant est l’âme des choses. Chaque chose possède
une expression propre, et cette expression lui vient du dehors. Chaque chose
résulte de l’intersection de trois axes, et ces trois axes composent cette
chose : une certaine quantité de matière, la façon dont nous
l’interprétons, et le milieu où elle se trouve. Cette table où j’écris est un
morceau de bois, c’est aussi une table, et c’est un meuble parmi d’autres dans
cette pièce. Si je veux traduire l’impression que me cause cette table, elle
devra se composer des idées qu’elle est en bois, que j’appelle cet objet une
table, en lui attribuant certains buts et usages, et qu’en elle se reflètent et
s’insèrent, en la transformant, les objets qui, par leur proximité, lui
confèrent une âme extérieure, ainsi que les objets posés sur elle. La couleur
même qu’on lui a donnée, couleur aujourd’hui ternie, et jusqu’à ses taches et
ses éraflures – tout cela, notons-le, lui est venu du dehors, et c’est cela
qui, bien plus que son essence de morceau de bois, lui donne son âme. Et le
plus intime de cette âme : le fait d’être une table, lui a été donné aussi
de cet en-dehors : la personnalité.
Je pense donc que ce n’est pas une erreur – ni humaine, ni littéraire –
que d’attribuer une âme aux choses que nous disons inanimées. Être une chose,
c’est faire l’objet d’une attribution. Il est peut-être faux de dire qu’un
arbre sent, qu’un fleuve “coule”, qu’un couchant est douloureux ou que la mer
calme (bleue du ciel qu’elle ne possède pas) est souriante (grâce au soleil qui
se trouve en dehors d’elle). Mais il est aussi erroné d’attribuer de la beauté
à quoi que ce soit. Il est tout aussi faux d’attribuer aux choses couleur,
forme et peut-être même existence. Cette mer, c’est de l’eau salée. Ce soleil
couchant, c’est le moment où la lumière du soleil commence à décliner par telle
longitude et sous telle latitude. Cet enfant qui joue devant moi est un
amoncellement intellectuel de cellules – mieux encore, un assemblage rouages
précis aux mouvements subatomiques, bizarre conglomérat électrique de millions
de systèmes solaires en miniature.
Tout vient du dehors, et l’âme humaine à son tour n’est peut-être rien
d’autre que le rayon de soleil qui brille et isole, du sol où il gît, ce tas de
fumier qu’est notre corps.
On pourrait trouver peut-être toute une philosophie dans ces
considérations, à condition d’avoir la force d’en tirer des conclusions. Je ne
l’ai point ; je vois surgir, attentives, des idées vagues, sur des
possibilités logiques, et tout se défait dans une vision de rai de soleil
dorant un tas de fumier, comme de la paille humide obscurément broyée, jonchant
un sol noirci auprès d’un mur de pierres grossières.
Je suis fait ainsi. Lorsque je veux penser, je vois. Lorsque je veux
descendre au fond de mon âme, je m’arrête bientôt, l’esprit ailleurs, au début
de la spirale que décrit le profond escalier, et regardant, par la fenêtre du
dernier étage, le soleil dont l’adieu mouille de teintes fauves l’entassement
confus des toits. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 88-89)
« 59. Chacun de nos rêves est toujours le même rêve, puisque ce ne
sont que rêves. Que les Dieux me changent mes rêves, mais non pas le don de
rêver. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 90)
« 59. Mes pauvres compagnons, qui rêvez tout haut, comme je vous
envie et vous méprise ! Je me sens bien plus proche des autres – les plus
pauvres, ceux qui n’ont personne d’autres qu’eux-mêmes à qui parler de leurs
rêves, personne d’autre pour qui faire des vers, si seulement ils en écrivaient
–, tous les pauvres diables qui n’ont d’autre littérature que leur âme, ni
aucun livre d’aucune autre [?], et qui meurent étouffés du seul fait d’exister,
sans avoir subi cet examen inconnu et transcendant qui seul habilite à
vivre. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 91)
« 61. Il est noble d’être timide, glorieux de ne point savoir
agir, grand de n’être pas doué pour vivre.
Si l’Ennui, qui est distanciation, et l’Art, qui est dédain, dorent
d’un semblant de satisfaction notre [vie]…
Ces feux follets qu’engendre notre pourriture sont, du moins, une
lumière au milieu de nos ténèbres.
Seul le malheur nous élève, et l’ennui, qui macère en son sein, est
héraldique, à l’instar des descendants de lointains héros. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 92)
« 62. J’éprouve un dégoût physique pour l’humanité
ordinaire ; c’est d’ailleurs la seule qui existe. Et la fantaisie me prend
parfois d’approfondir ce dégoût, de même qu’on peut provoquer un vomissement
pour soulager son envie de vomir. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 93)
« 62. Les intrigues, la médisance, le récit enjolivé de ce que l’on
n’a jamais osé faire, la satisfaction que tous ces pauvres animaux habillés
tirent de la conscience inconsciente de leur âme, la sexualité sans savon, les
plaisanteries qui ressemblent à des chatouilles de singes, l’affreuse ignorance
où ils sont de leur totale inimportance… Tout cela me fait l’effet d’un animal
monstrueux et abject, composé, dans l’involontaire des songes, des croûtes
humides du désir, des restes mâchouillés des sensations. » Fernando Pessoa
(in Le livre de l’intranquillité, p.
94)
« 84. Si je veux exprimer que j’existe en tant qu’âme
individualisée, je dirai : “Je suis moi.” Mais si je veux dire que
j’existe comme entité, qui se dirige et se forme elle-même, et qui exerce de la
façon la plus directe cette fonction divine de se créer soi-même, comment donc
emploierai-je le verbe être, sinon en le transformant tout d’un coup en verbe
transitif ? Alors, promu triomphalement, antigrammaticalement être
suprême, je dirai : “Je me suis.” J’aurai exprimé une philosophie entière
en trois petits mots. N’est-ce pas infiniment préférable à quarante phrases
pour ne rien dire ? Que peut-on demander de plus à la philosophie et à
l’expression verbale ? » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 114)
« 86. Je m’enfoncerai dans la brume, comme un homme étranger à
tout, îlot humain détaché du rêve de la mer, navire doté de trop d’être, à
fleur d’eau de tout. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 116)
« 90. L’infini se trouve dans une cellule comme dans le désert. La
tête appuyé sur une pierre, on dort d’un sommeil cosmique. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 119)
« 91. Si le rêveur est supérieur à l’homme d’action, ce n’est pas
que le rêve soit supérieur à la réalité. La supériorité du rêveur vient de ce
que rêver est infiniment plus pratique que de vivre ; le rêveur tire donc
de la vie un plaisir beaucoup plus grand et plus varié que l’homme d’action. En
d’autres termes – plus clairs et plus directs –, c’est le rêveur qui est
l’homme d’action. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 121)
« 103. Je cultive ma haine de l’action comme une fleur de serre.
Je me flatte moi-même de ma dissidence envers la vie. » Fernando Pessoa
(in Le livre de l’intranquillité, p.
133)
« 104. Aucune idée brillante ne peut être mise en circulation sans
qu’on y ajoute quelque élément de stupidité. La pensée collective est stupide
parce qu’elle est collective : rien ne peut franchir les barrières du
collectif sans y laisser, comme une dîme inévitable, la plus grande part de ce
qu’elle comportait d’intelligent. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 134)
« 107. Je suis de ces âmes que les femmes disent aimer, et
qu’elles ne reconnaissent jamais quand elles les rencontrent ; de ces âmes
que, si elles les reconnaissaient, elles ne reconnaîtraient pas pour
autant. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 136)
« 112. Nous n’aimons jamais vraiment quelqu’un. Nous aimons
uniquement l’idée que nous nous faisons de quelqu’un. Ce que nous aimons, c’est
un concept forgé par nous – et en fin de compte, c’est nous-mêmes. »
Fernando Pessoa (in Le livre de
l’intranquillité, p. 139-140)
« 112. Vivre, c’est ne pas penser. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 140)
« 116. Écrire, c’est oublier. La littérature est encore la manière
la plus agréable d’ignorer la vie. La musique nous berce, les arts visuels nous
stimulent, les arts vivants (tels que la danse et le spectacle) nous
divertissent. La première, cependant, s’éloigne de la vie, car elle en fait un
sommeil ; les seconds, en revanche, ne s’éloignent pas de la vie – les uns
parce qu’ils ont recours à des formules visuelles, donc vitales, les autres
parce qu’ils vivent de la vie humaine elle-même.
Ce n’est pas le cas de la littérature, qui, pour son compte, simule la
vie. Un roman, c’est l’histoire de quelque chose qui ne s’est jamais passé, et
un drame est un roman sans narration. Un poème est l’expression d’idées ou de
sentiments coulés dans un langage que personne n’emploie, car personne ne parle
en vers. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 142-143)
« 117. J’ai entendu un enfant dire un jour, pour suggérer qu’il
était sur le point de pleurer, non pas “J’ai envie de pleurer”, comme l’eût dit
un adulte, c’est-à-dire un imbécile, mais : “J’ai envie de larmes.” Et
cette phrase, totalement littéraire, au point qu’on la trouverait affectée chez
un poète célèbre (s’il s’en trouvait un pour l’écrire), se rapporte directement
à la chaude présence des larmes jaillissant sous les paupières, conscientes de
cette amertume liquide. “J’ai envie de larmes” ! (…) Dire ! Savoir
dire ! Savoir exister par la voix écrite et l’image mentale ! La vie
ne vaut pas davantage : le reste, ce sont des hommes et des femmes, des
amours supposées et des vérités factices, subterfuges de la digestion et de
l’oubli, êtres s’agitant en tous sens – comme ces bestioles sous une pierre
qu’on soulève – sous le vaste rocher abstrait du ciel bleu et dépourvu de
sens. » Fernando Pessoa (in Le livre
de l’intranquillité, p. 143-144)
« 121. Comme tous les êtres doués d’une grande mobilité mentale,
j’éprouve un amour organique et fatal pour la fixité. Je déteste les nouvelles
habitudes et les endroits inconnus. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 146)
« 123. Je pourrais m’en aller chercher la richesse en Orient, mais
non point la richesse de l’âme, parce que cette richesse-là, c’est moi-même, et
que je suis là où je suis, avec ou sans Orient. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 147)
« 123. Éternels passagers de nous-mêmes, il n’est pas d’autre
paysage que ce que nous sommes. Nous ne possédons rien, car nous ne nous
possédons pas nous-mêmes. Nous n’avons rien parce que nous ne sommes rien.
Quelles mains pourrais-je tendre, et vers quel univers ? Car l’univers
n’est pas à moi : c’est moi qui suis l’univers. » Fernando Pessoa (in
Le livre de l’intranquillité, p. 148)
« 124. Le désir de comprendre, qui remplace chez tant d’âmes
nobles le désir d’agir, appartient à la sphère de la sensibilité. Substituer
l’intelligence à l’énergie, rompre le lien entre la volonté et l’émotion, en
ôtant tout intérêt aux actes de la vie matérielle – voilà ce qui, une fois
obtenu, vaut plus que la vie même, car il est bien difficile de la posséder
entièrement, et si triste de ne la posséder que partiellement.
Les Argonautes disaient qu’il est nécessaire de naviguer, mais non
point de vivre. Argonautes nous-mêmes d’une sensibilité maladive, disons qu’il
est nécessaire de sentir, mais non pas de vivre. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p.
149-150)
« 127. Je ne m’indigne pas, car l’indignation est le fait des âmes
fortes ; je ne me résigne pas, car la résignation est le fait des âmes
nobles ; je ne me tais pas non plus, car le silence est le fait des
grandes âmes. Or, je ne suis ni fort, ni noble, ni grand. Je souffre et je
rêve. Je me plains parce que je suis faible et, comme je suis artiste, je me
distrais en tissant des plaintes musicales et en disposant mes rêves de la façon
qui plaît le mieux à l’idée que je me fais de leur beauté.
Je regrette seulement de ne pas être un enfant (je pourrais croire à
mes rêves), ni un fou (je pourrais écarter de mon âme tous ceux qui
m’assiègent). » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 152)
« 138. L’expérience de la vie n’enseigne rien, de même que
l’histoire ne nous informe sur rien. La véritable expérience consiste à
restreindre le contact avec la réalité, et à intensifier l’analyse de ce
contact. Ainsi la sensibilité vient-elle à se développer et à s’approfondir,
car tout est en nous-mêmes ; il nous suffit de le chercher, et de savoir
le chercher.
Qu’est-ce que voyager, et à quoi cela sert-il ? Tous les soleils
couchants sont des soleils couchants ; nul besoin d’aller les voir à
Constantinople.
Cette sensation de libération, qui naît des voyages ? Je peux
l’éprouver en me rendant de Lisbonne à Benfica, et l’éprouver de manière plus
intense qu’en allant de Lisbonne jusqu’en Chine, car si elle n’existe pas en
moi-même, cette libération, pour moi, n’existera nulle part. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 159-160)
« 155. J’écris en me berçant, comme une mère folle berçant son
enfant. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 176)
« 157. Certaines métaphores sont plus réelles que les gens qu’on
voit marcher dans la rue. Certaines images, au détour de certains livres,
vivent avec plus de netteté que bien des hommes et bien des femmes. Certaines
phrases littéraires ont une personnalité absolument humaine. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 178)
« 159. Je ne connais pas de plus grand plaisir, dans toute mon
existence, que celui de pouvoir dormir. L’abolition intégrale de la vie et de
l’art, l’éloignement total de tout ce qui est êtres et gens, la nuit sans
mémoire et sans illusions – et n’avoir plus enfin, ni passé ni avenir… »
Fernando Pessoa (in Le livre de
l’intranquillité, p. 180)
« 160. Toute cette journée, remplie de désolation avec ses nuages
tièdes et légers a été occupée par l’annonce d’une révolution. Ce genre de
nouvelles, vraies ou fausses, me cause toujours un malaise particulier, mélange
de dédain et de nausée physique. Cela me fait mal à l’intelligence, que
quelqu’un puisse s’imaginer qu’il va changer quoi que ce soit en s’agitant. La
violence, quelle qu’elle soit, a toujours représenté pour moi une forme hagarde
de la bêtise humaine. Et puis tous les révolutionnaires sont stupides comme le
sont, quoique à un degré moindre, parce que moins gênants, tous les réformateurs.
Qu’on soit révolutionnaire ou réformateur, l’erreur est la même.
Impuissant à dominer et à réformer sa propre attitude envers la vie,
qui est tout, ou son être lui-même, qui est presque tout, l’homme cherche une
échappatoire en essayant de changer les autres et le monde extérieur.
Tout révolutionnaire, tout réformateur est un évadé. Combattre, c’est
être capable de se combattre. Réformer, c’est être incapable de
s’améliorer. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 181)
« 163. Raconter, c’est créer, car vivre ce n’est qu’être
vécu. » Fernando Pessoa (in Le livre
de l’intranquillité, p. 184)
« 165. Je me souviens avec une tristesse ironique, d’une
manifestation ouvrière, dont j’ignore le degré de sincérité (car j’admets
toujours difficilement la sincérité des mouvements collectifs, étant donné que
c’est l’individu seul avec lui-même qui pense réellement, et lui seul). C’était
un groupe compact et désordonné d’êtres stupides en mouvement, qui passa en
criant diverses choses devant mon indifférentisme d’homme étranger à tout cela.
J’eus soudain la nausée. Ils n’étaient même pas assez sales. Ceux qui souffrent
véritablement ne se rassemblent pas en troupes vulgaires, ne forment pas de
groupes. Quand on souffre, on souffre seul. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 185)
« 171. Un homme doté de la véritable sagesse peut savourer le
spectacle du monde entier en restant assis sur sa chaise, sans même savoir
lire, sans parler à quiconque, rien que par l’usage de ses sens et grâce à une
âme ignorant ce que c’est que d’être triste.
Monotoniser la vie, pour qu’elle ne soit jamais monotone. Rendre anodin
le quotidien, pour que la plus petite chose nous devienne une
distraction. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 192-193)
« 175. À l’heure actuelle, le monde appartient aux imbéciles, aux
agités et aux sans-cœur.
On s’assure aujourd’hui le droit de vivre et de réussir par les mêmes
moyens, pratiquement, que ceux qui vous assurent le droit d’être interné dans
un asile : l’incapacité de penser, l’amoralité et la surexcitation. »
Fernando Pessoa (in Le livre de
l’intranquillité, p. 196-197)
« 188. L’homme commun, si dure que soit pour lui l’existence,
connaît au moins le bonheur de ne pas y penser. Vivre la vie extérieurement, la
vivre au fil des jours, comme font les chats ou les chiens – ainsi font les
hommes ordinaires, et c’est ainsi qu’il faut vivre la vie pour pouvoir compter
au moins sur la satisfaction des chats et des chiens. Penser revient à
détruire. Le processus de la pensée y voue la pensée elle-même, car penser,
c’est décomposer. Si les hommes savaient méditer sur le mystère de la vie,
s’ils savaient ressentir les mille complexités qui guettent l’âme, à chaque
pas, dans toute action – ils n’agiraient jamais, ils n’oseraient même pas
vivre. Ils se tueraient plutôt de peur, comme les gens qui se suicident pour ne
pas être guillotinés le lendemain. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 206)
« 194. J’éprouve une grande lassitude au centre de mon cœur. Celui
que je n’ai jamais été me désole, et je ne sais quelle sorte de nostalgie naît
de mon souvenir de lui. Je suis tombé, en me heurtant aux espoirs et aux
certitudes, et avec moi tous les soleils couchants. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 211)
« 197. Le temps ! Le passé ! Soudain quelque chose – un
parfum senti par hasard – soulève en mon âme le bâillon qui étouffait mes
souvenirs… Tout ce que j’ai été et ne serai jamais plus ! Tout ce que j’ai
été et n’aurai plus jamais ! Et les morts ! Ces morts qui m’ont aimé
tout enfant !
Quand je les évoque, toute mon âme se glace et je me sens banni des
cœurs humains, seul dans la nuit de moi-même, et pleurant tel un mendiant, le
silence clos de toutes les portes. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 214)
« 209. Écrire, c’est objectiver nos rêves, c’est créer un monde
extérieur qui nous offre la récompense [?] évidente de notre tempérament
d’écrivain. Publier, c’est apporter ce monde extérieur aux autres ; mais à
quelle fin, si le seul monde extérieur que nous possédions en commun, eux et
nous, c’est le “monde extérieur” réel, celui de la matière, du monde visible et
tangible ? Mais les autres, qu’ont-ils donc en commun avec le monde que je
porte en moi ? » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 227)
« 215. Je n’ai jamais appris à exister. » Fernando Pessoa (in
Le livre de l’intranquillité, p. 231)
« 215. Je voudrais que la lecture de ce livre vous laisse
l’impression d’avoir traversé un cauchemar voluptueux. » Fernando Pessoa
(in Le livre de l’intranquillité, p.
231)
« 222. Brusquement, une clarté formidable a volé en éclats. Elle a
tout pétrifié, dans les cerveaux comme dans la maison. Tout s’est pétrifié,
d’un seul coup. Les cœurs ont cessé de battre un instant. Nous sommes tous des
gens très sensibles. Le silence est terrifiant, comme s’il y avait eu mort
d’homme. Le son grandissant de la pluie soulage enfin comme si en elle
coulaient les larmes de tout. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 237)
« 223. Le glaive d’un éclair blafard a voltigé obscurément dans la
vaste pièce. Et le son attendu, gorgée longuement retenue, a explosé en migrant
vers les profondeurs. Le bruit de la pluie a éclaté en sanglots, comme des
pleureuses dans l’intervalle des phrases. Des sons légers se sont détachés plus
nettement, inquiets, dans la maison. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 238)
« 225. Qui donc me sauvera d’exister ? Ce n’est pas la mort
que je veux, ni la vie : mais cet autre chose qui luit au fond de mon
désir angoissé, comme un diamant imaginé au fond d’une caverne dans laquelle on
ne peut descendre. C’est tout le poids, toute la douleur de cet univers réel et
impossible, de ce ciel, étendard d’une armée inconnue, de ces tons pâlissant
lentement dans un air fictif, où le croissant d’une lune imaginaire émerge dans
une blancheur électrique et figée, découpé en bords lointains et insensibles.
C’est le manque immense d’un Dieu véritable qui est ce cadavre vide, cadavre
du ciel profond et de l’âme captive. Prison infinie – et parce que tu es
infinie, nulle part on ne peut te fuir ! » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p.
239-240)
« 254. (…) nier l’existence (…) de Dieu, me semble l’une de ces
imbécillités qui affectent sur un point l’intelligence d’hommes qui, sur tous
les autres points, peuvent fort bien être des esprits supérieurs – comme il
arrive aux gens qui se trompent dans leurs additions, ou encore (et pour mettre
en jeu l’intelligence de la sensibilité) aux gens qui ne sont pas sensibles à
la musique, à la peinture ou à la poésie. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 264)
« 254. On ne peut nier l’existence du mal, mais on peut se refuser
à admettre que l’existence même du mal soit mauvaise. Je reconnais que le
problème demeure, mais s’il demeure, c’est que notre imperfection
demeure. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 265)
« 255. Tout ce que nous pouvons dire ou faire, penser ou sentir,
porte un même masque, revêt un même travesti. Nous avons beau ôter les costumes
endossés, nous ne parvenons jamais à la nudité, car la nudité est un phénomène
de l’âme, et non pas un simple déshabillage. Ainsi, vêtus d’âme et de corps,
avec nos multiples costumes nous collant à la peau comme les plumes aux
oiseaux, nous vivons heureux ou malheureux, ou sans même savoir ce que nous
sommes, le court espace de temps que nous donnent les dieux pour les amuser,
tels des enfants jouant à des jeux parfaitement sérieux. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 267)
« 256. J’ai toujours éprouvé une répugnance presque physique pour
les choses secrètes – les intrigues, la diplomatie, les sociétés secrètes,
l’occultisme. (…) Ce qui m’impressionne le plus chez (…) ces grands
connaisseurs de l’invisible, c’est que, lorsqu’ils écrivent pour nous conter ou
suggérer leurs fameux mystères, ils écrivent tous fort mal. Mon entendement
s’offusque de constater qu’un homme capable de maîtriser le Diable n’est pas
capable de maîtriser la langue portugaise. Pourquoi le commerce avec les démons
serait-il plus aisé que le commerce avec la grammaire ? » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 267)
« 258. Avoir touché les pieds du Christ, ce n’est pas une excuse
pour faire des fautes de ponctuation.
Si quelqu’un n’est capable de bien écrire que lorsqu’il est ivre, je
lui dirai : Enivrez-vous. Et s’il me répond que cela lui fait mal au foie,
je lui dirai : Qu’est-ce donc que votre foie ? C’est une chose morte
qui ne vit qu’aussi longtemps que vous vivez, alors que les poèmes que vous
pourrez écrire vivront sans un quelconque “aussi longtemps”. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 269)
« 260. Nous ne pouvons nous dérober, quoi que nous en ayons, à la
fraternité universelle. Nous nous aimons tous les uns les autres, et le
mensonge est le baiser que nous échangeons. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 272)
« 263. (…) l’ennui c’est cela : la perte, pour l’âme, de sa
capacité à se mentir, le manque, pour la pensée, de cet escalier inexistant par
où elle accède, fermement, à la vérité. » (in Le livre de l’intranquillité, p. 276)
« 270. L’art nous délivre de façon illusoire, de cette chose
sordide qu’est le fait d’exister. » (in Le livre de l’intranquillité, p. 280)
« 270. Posséder, c’est perdre. Sentir sans posséder, c’est
conserver, parce que c’est extraire de chaque chose son essence. »
Fernando Pessoa (in Le livre de
l’intranquillité, p. 281)
« 274. Ah ! quelle erreur crasse, quelle erreur douloureuse
que cette distinction, établie par les révolutionnaires, entre les bourgeois et
le peuple, ou les nobles et le peuple, ou gouvernants et gouvernés ! La
distinction réelle se fait entre adaptés et inadaptés : le reste est littérature,
et mauvaise littérature. Le mendiant, s’il est adapté, peut être roi
demain : mais il aura dès lors perdu sa qualité distinctive de mendiant.
Il aura franchi la frontière, et perdu sa nationalité. » Fernando Pessoa
(in Le livre de l’intranquillité, p.
283)
« 283. La liberté, c’est la possibilité de s’isoler. Tu es libre
si tu peux t’éloigner des hommes et que rien ne t’oblige à les rechercher, ni
le besoin d’argent, ni l’instinct grégaire, l’amour, la gloire ou la curiosité,
toutes choses qui ne peuvent trouver d’aliment dans la solitude et le
silence. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 290)
« 303. Le monde appartient à ceux qui ne ressentent rien. La
condition essentielle pour être un homme pratique, c’est l’absence de
sensibilité. (…) il est deux choses qui entravent l’action : la
sensibilité et la pensée analytique, qui n’est elle-même rien d’autre, en fin
de compte, qu’une pensée douée de sensibilité. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 305)
« 310. Mon âme est un orchestre caché ; je ne sais de quels
instruments il joue et résonne en moi, cordes et harpes, timbales et tambours.
Je ne me connais que comme symphonie. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 311)
« 310. Tout effort est un crime, parce que toute action est un
rêve mort. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 311)
« 310. Tout plaisir est un vice – car rechercher le plaisir, c’est
ce que fait tout le monde dans la vie, et le seul vice vraiment noir, c’est de
faire comme tout le monde. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 312)
« 313. Je m’irrite du bonheur de tous ces gens qui ne savent pas
qu’ils sont malheureux. Leur vie humaine est remplie de faits qui
constitueraient une série de tourments sans fin pour une sensibilité véritable.
Mais comme leur vraie vie est purement végétative, ce qu’ils subissent passe
sur eux sans toucher leur âme, et leur existence, en fin de compte, ne peut
être comparée qu’à celle d’un homme qui serait affligé d’une rage de dents,
mais qui posséderait aussi une grande fortune – cette authentique fortune de
vivre sans même s’en apercevoir ; c’est là le don le plus précieux que
puissent nous faire les dieux, car il nous rend semblables à eux et supérieurs,
comme eux (quoique de manière différente), à la joie comme à la douleur.
C’est pourquoi, malgré tout, je les aime tant, mes chers
végétaux ! » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 314)
« 316. Nous avons tous en nous un côté parfaitement méprisable.
Chacun de nous porte un crime – celui qu’il a déjà commis, ou bien le crime que
son âme lui demande de commettre. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 315)
« 317. Je considère comme m’appartenant davantage, comme plus
proches par la parenté et l’intimité, certains personnages décrits dans les
livres, certaines images que j’ai connues sous la forme de gravures, que bien
des personnes que l’on dit réelles, et qui relèvent de cette inutilité
métaphysique que l’on appelle de chair et d’os. Et ce de chair et d’os, en
fait, les décrit fort bien : on dirait des choses découpées, posées sur
l’étal marmoréen de quelque boucherie, morts saignantes comme des vies,
côtelettes et gigots du destin. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, p. 316)
« 399. J’éprouve une nausée physique, montant du fond de
l’estomac, à l’égard des rêveurs d’idéals [?] – socialistes, altruistes,
humanitaires en tout genre. Ce sont des idéalistes sans idéal, des penseurs
sans pensée. Ils recherchent la surface de la vie pour obéir à la fatalité des
tas d’ordures qui dérivent à fleur d’eau et se croient beaux parce que les
coquillages vides dérivent à fleur d’eau, eux aussi. » Fernando Pessoa (in
Le livre de l’intranquillité, p. 385)
« 482. Se mouvoir, c’est vivre ; se dire, c’est
survivre. » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, p. 450)
« Qu’au comble de l’angoisse on découvre enfin le jour, et si l’on
ne découvre aucun jour, que ce jour-là soit tout de même celui que l’on
découvre ! » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, Notre-Dame du Silence, p. 464)
« C’est par la mort que nous vivons, car si nous sommes vivants
aujourd’hui, c’est uniquement parce que nous sommes morts à hier. C’est la mort
que nous attendons, car si nous pouvons croire à demain, c’est parce que nous
sommes assurés de la mort d’aujourd’hui. C’est par la Mort que nous vivons
quand nous rêvons, car rêver c’est nier la vie. C’est par la mort que nous
mourons lorsque nous vivons, car vivre c’est nier l’éternité ! La Mort
nous guide, la mort nous cherche, la mort nous accompagne. Tout ce que nous
possédons, c’est la mort, tout ce que nous désirons, c’est la mort, tout ce que
nous souhaitons désirer, c’est la mort. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, Marche
funèbre pour le roi Louis II de Bavière, p. 476-477)
« Un Homère ou un Milton n’ont pas plus de pouvoir qu’une comète
venant heurter la terre. » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, Marche funèbre pour le roi Louis II
de Bavière, p. 479)
« Je sens le poids de toute ma vie morte, de tous mes songes
vains, de tout ce qui a été mien sans jamais m’appartenir, dans le bleu de mes
ciels intérieurs, dans ce bruissement visuel des fleuves coulant dans mon âme,
dans la vaste quiétude agitée de ces champs de blé que je vois sans les
voir. » Fernando Pessoa (in Le livre
de l’intranquillité, Marche funèbre pour le roi Louis II de Bavière, p.
482)
« L’amour veut la possession – sans savoir ce que c’est. Si je ne
m’appartiens pas, comment pourrais-je t’appartenir, ou toi-même
m’appartenir ? Si je ne possède pas mon être même, comment pourrais-je
posséder un être qui m’est étranger ? Je suis moi-même différent de celui
auquel je suis semblable : comment pourrais-je être semblable à celui dont
je suis différent ? » Fernando Pessoa (in Le livre de l’intranquillité, L’Amant visuel, p. 489)
« À l’instar de notre ombre, la vie nous poursuit. Et l’ombre ne
disparaît que lorsque tout est devenu ombre. La vie ne cesse de nous poursuivre
que lorsque nous nous abandonnons à son mouvement.
Ce qu’il y a de plus douloureux dans le rêve, c’est qu’on n’existe pas.
En fait on ne peut pas rêver.
Qu’est-ce que posséder ? Nous n’en savons rien ; dès lors,
comment souhaiter posséder quoi que ce soit ? Vous me direz que nous
ignorons ce que c’est que de vivre – et que nous vivons… Mais vivons-nous
réellement ? Vivre sans savoir ce qu’est la vie, est-ce là
vivre ? » Fernando Pessoa (in Le
livre de l’intranquillité, L’Amant visuel, p. 490-491)
« Vis ta vie. Ne sois pas vécu par elle. » Fernando Pessoa
(in Le livre de l’intranquillité, De
l’art de bien rêver, p. 496)
« Ma sensibilité est celle d’une flamme au vent. » Fernando
Pessoa (in Le livre de l’intranquillité,
p. 507)
Fernando Pessoa |
Un vrai chef-d’œuvre !
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour votre commentaire enthousiaste ! Ce livre a marqué ma vie tout entière.
SupprimerUn livre exceptionnel!
RépondreSupprimerun livre exceptionnel!
RépondreSupprimerMerci pour ses beaux et larges extraits. Je me suis référé à mon édition chez Bourgois en 2 volumes, mais cela ne correspond pas. J'imagine que vous utilisez la version en un seul volume parue ultérieurement ?
RépondreSupprimerMerci pour ses beaux et larges extraits. J'ai voulu me référer à mon édition en 2 volumes chez Bourgois, mais cela ne correspond pas. J'imagine que vous vous référez à l'édition ultérieure en un seul volume ?
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