Il est difficile de dire, dans le
langage d'un fils à sa mère,
ce qui, en mon for intérieur, ne me
ressemble guère.
Tu es la seule au monde à savoir ce
qu'il en a toujours
été de mon cœur, avant tout autre
amour.
C'est pourquoi je dois te dire ce
qu'il est horrible de connaître :
c'est dans ta grâce que je vois mon
angoisse naître.
Tu es irremplaçable. C'est pourquoi
est condamnée
à la solitude la vie que tu m'as
donnée.
Et je ne veux pas être seul. J'ai
une faim démesurée
d'amour, de l'amour de corps sans âme
demeurés.
Car l'âme est en toi, c'est toi, tu
es simplement
ma mère et ton amour est mon
asservissement :
j'ai passé asservi à cette
sensation toute mon enfance,
sensation élevée, irrémédiable,
d'un engagement immense.
C'était le seul moyen de ressentir
la vie,
sa nuance absolue, sa forme absolue
: voilà, elle est finie.
Nous survivons et c'est la
confusion
d'une vie renée hors de la raison.
Je te supplie, ah je te supplie, de
ne pas vouloir mourir.
Je suis ici, seul, avec toi, en un
avril à venir...
Pier Paolo Pasolini
Poésie en forme de rose, traduction par René de Ceccatty, Éditions Payot, Collection Rivages poche, p. 83-85
Poésie en forme de rose, traduction par René de Ceccatty, Éditions Payot, Collection Rivages poche, p. 83-85
Vittorio La Verde, Pier Paolo Pasolini con la madre nella sua casa di Monteverde. Roma, 1965 |
Pier Paolo Pasolini : Qui je suis [1998 / France Culture] :
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